samedi 5 mai 2007

vacances en Espagne - 3. Riglos

Grimper dans un champ de patates...

Nous voici à Riglos.
Depuis le temps qu'on en rêve ! Depuis quelques mois, avec Romain, on se motive pour enchaîner les voies en gros dévers à Altissimo pour se préparer à la Fiesta de los Biceps, la voie mythique du site.
On découvre les fameuses tours de conglomérat quelques kilomètres avant d'arriver au village de Riglos, niché à leur pied. Pour l'approche, c'est plutôt minimaliste : 10 minutes pour la Visera, 5 pour le Pison, et peut être 15 pour le Fire ! A notre arrivée, le sommet des tours flirte avec les nuages ; pour compléter ce tableau inquiétant, de nombreux vautours rôdent autour des falaises.


Le rocher de Riglos est plutôt inquiétant au premier abord : on a l'impression que les gros cailloux qu'on empoigne allègrement vont nous rester dans les mains. Mais le ciment qui les relie à la paroi est bien solide : ça tient. On se retrouve donc à grimper dans du gros dévers dans un niveau de difficulté très abordable, en tirant sur ces « patates » (bolos en espagnol). Il faut juste avoir un peu de conti : merci l'entraînement à Altissimo !



Pour le logement, on commence par l'auberge de Toño, le guide qui a participé au sauvetage de Jérôme, cet hiver. C'est un peu enfumé (tout le monde s'y est réfugié pour fuir la pluie), mais Toño est vraiment sympa. Il nous prête un local pour faire sécher nos affaires, ainsi que sa cuisine pour nous faire à manger. Pour 35€ pour deux personnes, on dort dans un vrai hôtel - y'a pas à se plaindre. Mais bon, pour les nuits suivantes, on va aller dormir à la gare, beaucoup plus roots. De toutes façons, Toño part grimper à Rodellar pendant la semaine, à notre grand dam : c'est le seul bar du village !

Pour notre première voie à Riglos, notre choix s'est porté sur la Murciana classique de difficulté modérée (6a obligé) dans la superbe face sud du Pison qui surplombe le village. Une classique, à Riglos, c'est une voie qu'on devine de loin à la trainée blanche de magnésie : les parois sont déversantes et la pluie ne vient pas les nettoyer !
On se lève à 7h pour découvrir que les falaises sont encore bien à l’ombre et qu’il ne fait pas chaud du tout (par contre il fait beau). En plus, Toño a fermé la cuisine avec toute notre bouffe dedans. De toutes façons, quand il arrive, à 9h, les falaises sont encore à l’ombre, et on a tout notre temps pour déjeuner avant de gagner la face, vers 10h30, lorsque le soleil arrive.
Nous partons donc tous les 4 dedans, Romain et Claire devant, Cédric et moi qui suivons. La voie est vraiment à la hauteur de sa réputation. Escalade très variée, d'abord dans des fissures, puis dans le dévers de la partie centrale de la face, la fameuse "rivière de pierre", et enfin les dernières longueurs, moins déversantes, où l'on découvre les fameuses "panzas" de Riglos, ces surplombs ventrus où il faut faire preuve d'un peu de détermination... et finalement pas mal bourriner... au final, c’est à mon avis la plus belle voie qu’on ait faite à Riglos, et donc l’une des plus belles que j’ai jamais faite. En tous cas, on est rassurés : le 6a de Riglos, c’est beaucoup plus facile que le 6a de la Roca del Arcs !

Le lendemain, c’est le grand jour. En fait, ça se décide sans trop qu’on y pense : Claire et Romain devaient partir faire Zulu Demente à la Visera, mais Claire n’est pas très motivée. On décide alors au dernier moment pour partir faire la Fiesta . J’ai mal dormi (le béton du quai de la gare est moins confortable que les lits de l’auberge) et je suis un peu dans les vaps. Heureusement, l’escalade exigeante des premières longueurs me réveille vite. Les trois premières longueurs ne sont en effet pas déversantes et les patates sont moins saillantes. C’est donc plus fin et plus à doigts.
Et puis après on rentre vraiment dans la légende de la voie : les trois longueurs suivantes partent dans le gros dévers de la partie sommitale de la Visera, et ça déverse de plus en plus. Difficile de coter ces difficultés : d’après les topos, ce serait 6b/6b+/6c, certains donnent des cotations plus sévères encore, mais en fait, ce n’est pas dur du tout : il y a des bacs tout le long. Simplement, c’est très explosif. Dans L6, je suis obligé de m’arrêter pour laisser un peu dégonfler les bras : c’est la Fiesta de nos biceps ! Après un petit arrêt, ça enchaîne très bien. Le dernier relais à la sortie du gros dévers est vraiment mythique : c’est une patate géante sur laquelle on peut carrément s’asseoir au dessus d’un vide vertigineux : 200 m en vertical, 30 m en horizontal !
Pour finir, petit plantage : on croise une autre voie imprévue. Comme on n’a pas le topo, Romain part à droite et se retrouve dans le 7b final de « de Naturaleza Salvaje », au lieu du 6a prévu. Heureusement, c’est équipé assez rapproché et ça passe. Alors que je prends des photos de la face baignée par le soleil, j’entends deux gros coups de tonnerre. Je me dépêche un peu, commence à grimper, et tout d’un coup, Romain me crie : « il grêle ! ». Effectivement, je vois tomber des grêlons quelques mètres derrière moi. Je suis encore au sec. Je me dépêche et grimpe n’importe comment en tirant sur les points : immonde. Tout ça pour me prendre une douche monumentale en arrivant au relais. Je ne m’y attarde pas et finit la dernière longueur facile en grimpant dans un vrai torrent. Le temps que Romain me rejoigne, la pluie à cessé, et c’est au soleil qu’on prend la photo au sommet !
En tous cas, on l’a faite cette voie dont on rêvait tant. Finalement, ce n’est pas très dur. Il faut juste avoir un peu de conti pour enchaîner entre les points, mais de ce côté-là, ça allait très bien.
Le lendemain, il faut reposer un peu les bras. Enfin pour moi, puisque Romain part avec Cédric faire Zulu Demente, à droite de la Fiesta. Avec claire, on va faire quelques courses à Ayerbe, la « ville » la plus proche. Commerçants très sympa ; ça donne envie d’apprendre l’espagnol. Dans l’après midi, on va faire une petite voie au Volaos, entre le Pison et la Visera : Todo tiene fin. Pas si reposant que ça : ce n’est pas du dévers, mais une succession de panzas pas toujours très faciles à négocier. Au final, c’est une belle petite voie pas donnée tout de même, homogène dans le 6a/6b, avec la particularité amusante que le pas le plus dur est le premier, très patiné, qui n’est coté que… 5c.


On arrive au village juste après Romain et Cédric. Pour sa dernière voie des vacances, Cédric est comblé, la voie a l’air superbe. Ce soir, Jo nous rejoint avec sa Twingo qui a traversé sans dommage les Pyrénées. Soirée tous les 5 à la gare. Le lendemain matin, Cédric nous quitte par le train (il n’a pas dû aller le chercher très loin !), direction… Lille, qu’il rejoindra le soir même ; belle performance !




Nous on part tous les 4 à la Visera. Claire n’est toujours pas motivée par Zulu Demente. J’y emmène donc Jo, qui va tout de suite affronter le grand vide pour sa première voie à Riglos. Ca commence mal : le premier pas est engagé et patiné ; je m’y colle donc, mais je lui laisse la deuxième longueur où il s’en tire très bien. A la vire, on croise Moskitos, et donc Claire et Romain. Comme on s’est fait doubler par des Espagnols (c’est le week-end, on n’est plus entre Français), on se fait un petit farniente tous les 4 sur la grosse vire.
Et puis on va s’attaquer au dévers central de la Visera. Moins prononcé qu’à la Fiesta, il commence plus tôt. C’est un vrai plaisir : escalade grisante sur grosses patates : génial ! Pour Jo, c’est quand même un peu dur, mais avec quelques sangles, il cravate les patates pour passer les pas durs en artif : à la wallegaine !!! Voir sur son blog ses impressions… Dernière longueur complètement mythique dans un dévers complètement renversant, pire qu’à la Fiesta, mais plus dur aussi (7a+). Je m’autorise quelques pas en artif, dommage.

Et voila, Riglos, c’est fini ! On s’en va quand même valider tout ça chez Toño avec une bonne bière. Vraiment super sympa, ça donne vraiment envie de revenir, autant pour l’escalade que pour le voir.

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