samedi 3 novembre 2007

le Hoggar -3- Tesnou - le désert

Après à peine deux petites journées passées dans ce petit paradis qu'est Tissalatine, nous reprenons la route pour Tesnou. Nous laissons à regret les dômes cuivrés émergeant de l'or des oueds pour regagner le ruban de bitume de la Route Nationale 1.
Jusqu'au village d'In Amguel, la route est très bonne. Ensuite, elle devient plus défoncée (elle est d'ailleurs en travaux).
Nous rejoignons un autre groupe de grimpeurs, Yannick et JB qui voyage avec la même agence que nous. Nous nous apercevrons plus tard, au fil d'une conversation, que Yannick et moi nous sommes croisés il y a deux ans dans Visite Obligatoire, à la Dibona ! Le monde est petit, non ? J'en profite pour donner un lien vers son blog - il est dix fois plus mordu de montagne que moi !
La route est assez monotone, au milieu d'une plaine désolée où les arbres sont l'exception. Nous nous arrêtons pour manger sous un acacia qui a été aménagé à cet effet (les branches basses pleines de piquants ont été coupées).
Nous passons au pied de la montagne de Taourirt Ta-n Afella, qui domine le poste militaire d'Ineker (l'un des nombreux camps militaires qui borde la route) : elle est entièrement ceinte par une clôture : c'est en effet l'un des deux sites où la France a testé son arme atomique. Quel gâchis !

Après 250km de route, nous quittons la nationale pour rentrer dans un large oued. Les montagnes de Tesnou se dressent devant nous, vastes dômes grisâtres d'où émergent quelques aiguilles plus acérées. Nous avons la chance d'apercevoir quatre gazelles que Mohammed pourchasse à toute allure en klaxonnant !

Enfin, en passant un vague col, le fameux Éléphant se dresse devant nous, énorme dôme de basalte émergeant du sable. Nous montons le bivouac au pied même des falaises, à l'abri derrière une échine rocheuse. Le vent du désert souffle.
Nous partons nous promener au pied de la montagne. Arrivé au bout du dôme, il n'y a plus rien qu'une vaste plaine désolée. Au loin d'autres pics, distants de plus de 50 km. Autour de nous, pas un bruit, pas une trace de vie. L'impression d'être au bout du monde. Le soleil s'abîme dans la brume - le ciel est couvert. L'endroit est désolé. Seul y pousse un calotropis, sorte de plante grasse dont le lait peut paraît-il rendre aveugle. Déjà que je suis à moitié sourd, on va éviter...
La soirée est plus animée avec le renfort d'Amoud et de Darman, le cuisinier et le guide de Yannick et JB.





protection brevetée des touareg contre le vent de sable


Le lendemain, ceux-ci se lèvent tôt avec pour objectif d'enchaîner 4 voies dans la journée. Nous ne somme pas vraiment sur le même rythme, bien décidés à prendre notre temps et à profiter du cadre exceptionnel et de nos guides si sympa. C'est l'avantage de partir 2 semaines - eux ne sont là que pour une semaine, ce qui est bien court.
Nous choisissons vraiment l'option flemme avec la voie Éclipse de Lune qui part quasiment du bivouac. Il s'agit de la seule voie en terrain d'aventure de l'Éléphant.
L1 - grosse écaille, puis traversée vers une fissure avec le seul spit de la voie qui ne sert à rien tant il est mal placé ! Relais à bout de corde.
L2 - fissure
L3 - la longueur


la méthode de Romain : très jolie, mais un peu dure et expo





la méthode de Claire : y'a de ça, mais le sac gêne un peu





ma méthode à moi, assez en place et très facile







la méthode de Cédric, à la limite de l'escalade...



L4 - superbe longueur avec le passage du toit sur la droite suivi de belles dülfer pas forcément aisées. Claire se paye une galère mémorable en coinçant la corde dans une fissure !
L5 - traversée fine en dalle pour rejoindre une fissure magnifique
L6 - la fissure se transforme en cheminée - improtégeable. On sort sur une vire.
A partir de là, on a un peu improvisé les deux longueurs suivantes en continuant à peu près tout droit au lieu de suivre la rampe à gauche. Ca rajoute une longueur d'escalade sympa.
On retrouve Romain et Claire au sommet, puis Yannick et JB au bivouac.










Romain, Cédric et JB partent faire les 2 premières longueurs de Llorenç d'Arabia, la plus dure des voies de l'Éléphant, en 7a. Moi je préfère aller faire un tour dans le désert : 2h de randonnées tout seul, à la tombée de la nuit - une expérience inoubliable !






Le soir, c'est "soirée énigme", une spécialité de nos guides touaregs. Heureusement, nous avons l'arme fatale : Cédric, qui réussit presque à toute les résoudre. très rigolo aussi les jeux de noeuds où on se retrouve emberlificoté dans son chèche et où il faut réussir à se démêler.
Les nuits de Tesnou sont chaudes - le ciel est couvert et on est plus bas qu'à Tissalatine (moins de 1000 m). Le duvet est excessif, mais les simples couverture pas suffisantes. Du coup, Cédric et moi nous nous sommes enrhumés ! Cela vaut peut être mieux que d'aller faire des cairns toute la nuit comme Claire.

Le lendemain, Claire n'est pas très motivée (le coincement de corde et les cairns de la nuit sans doute...) et Cédric est bien enrhumé. Nous partons donc à deux Romain et moi, pour faire l'Enfant des Sables, une voie qui reste à l'ombre, ce qui est fort appréciable vu la chaleur qui règne en milieu de journée.
Après deux longueurs dans le style inimitable de Tesnou (dalle peu inclinée avec un point tous les 10 m... voire plus), on attaque le crux : une longueur d'anthologie en 6c que j'enchaîne à vue, un peu surpris : j'ai vraiment randonné. En tous cas, c'est absolument majeur.



C'est tellement facile que Romain y va sans les mains ! 6c tout de même !




Romain se met un peu la pression dans la longueur suivante où le rocher est moyen (toujours des écailles fragiles) mais qui semble plus facile que le 6b annoncé, puis encore un petit mur technique avant de sortir sur les dalles sommitales où il faut chercher les points au - mais c'est très facile.
On ne reste pas longtemps au sommet car il fait très chaud - redescente au bivouac. Dernière soirée pour Yannick et JB qui repartent le lendemain. Nous décidons de rester encore une nuit dans ces lieux magiques où l'on se sent vraiment seuls au monde.










Le soir, Mohammed nous emmène nous promener dans les dunes : figures fantasmagorique du vent sur le sable - lumières fantasques du soleil se couchant dans les nuages derrière l'Éléphant. Et toujours ce silence et cette impression d'infinie solitude.










Samedi, nous partons donc dans Nomade pour ce qui semble être sa première répétition depuis son ouverture, en janvier dernier, par des clients italiens de Mohammed. Elle est juste à gauche de la fameuse "Never Up Never In" et ses 2 points par longueur, et semble mieux équipée.









Pour L1, il n'y a que 2 spits de 8, mais c'est vraiment facile.
Dans L2, déjà un peu plus raide, il doit y en avoir 4 ou 5 (j'en ai raté un)
Dans L3, il y en a un nombre incalculable ! C'est certes la longueur la plus dure de la voie, mais ça dépasse difficilement le 5b, et je dois sauter les points pour qu'il me reste des dégaines à la fin ! Mais ce faisant, l'escalade n'est jamais plus engagée que dans le 6c de l'Enfant des Sables ! En plus la longueur fait 55m, ce qui oblige à finir en corde tendue.
L4 commence par le passage clé en 5c, équipé déjà plus normalement, puis ça se couche.
On finit par grimper en corde tendue avec un point tous les 40 à 50m. A la fin, on ne met même plus les mains : c'est juste de la marche en terrain raide ! Très ludique.









Le soir, nous allons admirer le coucher de soleil sur la plaine. Nous sommes de nouveau une petite équipe de 6. Pour la dernière fois, Larsen nous prépare le repas. Nuit grandiose sous les étoiles et lever de soleil dantesque.










Nous repartons par un autre oued pour faire le tour de la montagne. on rencontre de nombreuses tombes préhistoriques qui datent d'environ 5000 ans et n'ont sans doute jamais été fouillées. On trouve aussi des morceau de poterie - certains sont finement travaillés.
Puis nous retrouvons la "civilisation". on croise d'abord un berger et ses chèvres, puis on retrouve la route à la mosquée du Marabout Sidi Moulay Lahsene, petite lieu saint niché au pied de la montagne de Tesnou où il y a un pompage d'eau... malheureusement à sec.
Le retour à Tam n'a pas beaucoup d'intérêt - désert monotone, chaleur, poussière. La douche à Tam est la bienvenue, même si on ne se sent pas sales : l'air du désert est tellement sec que l'on ne transpire pas.
Le soir, nous mangeons un couscous d'anthologie chez Mohammed, avec Amoud qui sera notre cuisinier pour la deuxième semaine. Le repas est préparé par la femme de Mohammed, mais selon les traditions locales, elle ne mange pas avec les hôtes de la maison - assez déroutant pour nous.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Hey rémi,
En effet, ce fut une bien belle coincidence de se retrouver dans le Hoggar après Visite Obligatoire.
Si par hasard, tu décides de revenir grimper en Vanoise, comme à l'Aiguille éponyme par exemple, fais moi signe :-)
En attendant, ton récit du Vignemale m'a convaincu d'y trainer ma quincaillerie cet été.
Au plaisir